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Réaliser ce tour du monde a été beaucoup plus facile que je ne l’imaginais

Devoir chaque jour préparer mes déplacements, mes activités, organiser mes hébergements (surtout les hébergements chez l’habitant, qui se préparent en général plusieurs semaines à l’avance sur internet), faire et défaire mon sac en permanence... C’est une petite routine qui se met en place assez rapidement, c’est fou ce que l’être humain possède comme capacités d’adaptation à un nouveau mode de vie !
Mes prises de consciences consécutives à ce tour du monde

Je pense que je suis parti trop longtemps et que j’ai eu trop de prises de conscience pour pouvoir revenir à ma vie d'avant, qui générait déjà en moi pas mal d’insatisfaction avant ce grand voyage. Maintenant c'est à nouveau le schéma « métro boulot dodo » et c’est dur à vivre. Je ne me reconnais pas dans ce que propose la « société moderne occidentale » actuelle, toujours poussée vers une sur-consommation inutile et un certain individualisme. Ce qui donne un sens à la vie, ce n’est pas les 40 ans que l’on va passer au travail, ce sont toutes les fois où l’on aura osé sortir du moule. La sur-activité humaine est en train de détruire toute forme de vie sur terre (épuisement des ressources naturelles, chute de la biodiversité…) donc ça ne risque pas de lui donner un sens.
Je me sens différent depuis mon retour car non seulement mon voyage m’a beaucoup apporté, mais surtout j’ai changé ma façon de voir les choses et j’ai parfois la sensation d’être comme un étranger dans mon propre pays, ou avec certains de mes amis. Cela me fatigue et m’attriste de ne pas voir les gens plus souriants dans la rue, de les entendre sans cesse se plaindre, souvent juger les autres sur l’apparence, critiquer par derrière leurs voisins ou leurs collègues… Je me heurte souvent à l’arrogance, au nombrilisme et aux egos surdimensionnés des uns et des autres (ce problème se fait davantage ressentir à Paris qu’en province, probablement car c’est une ville de cadres, mais aussi car c’est une ville prestigieuse et que le prestige ça nourrit l’ego). La plupart de ces « moi je » ne se rendent pas compte de l’énergie négative qu’ils dégagent, et j’ai de plus en plus de mal à supporter cela surtout après avoir longuement côtoyé l’humilité des peuples d’Amérique latine.
Un petit choc culturel mais un grand choc sur le plan humain
Malgré les différences flagrantes entre certaines cultures, je n’ai pas vraiment ressenti de « choc culturel » à proprement parler (même pas en Inde, car j’y étais déjà allé 4 fois). Je pense qu’avec la mondialisation, on assiste à une certaine uniformisation des modes de vie dans un très grand nombre de pays. Donc pour moi, le choc a été surtout humain. Après avoir vécu une vie dans le confort de mon joli petit appartement près de Paris, dans un environnement humain assez froid, ce voyage m’a aidé à réaliser que la majorité des gens sont avenants et bienveillants, et que l’argent ne fait pas le bonheur. J’ai été agréablement surpris par le super accueil des locaux (la palme revenant aux québécois et aux latino-américains). Le dicton « c’est ceux qui possèdent le moins qui donnent le plus » s’est révélé exact, et ce, dans n’importe quel endroit ! J’ai rencontré énormément de gens souriants, menant une vie simple, parfois difficile, mais pas forcément malheureuse. Car les populations pauvres savent mieux que quiconque cultiver leurs qualités de cœur, alors que dans les pays riches c’est le mental qui est valorisé.
Ce voyage m’aura aussi permis de me faire quelques nouveaux amis (surtout en Amérique latine) avec qui je garde contact.
Une belle leçon de sagesse en Chine

Les changements en moi provoqués par cette aventure

Ce que le voyage a changé pour moi, je crois, c'est que j'ai vraiment pris conscience que je suis l'acteur de ma vie, et qu'il ne tient qu'à moi de la vivre pleinement. Je me prends moins la tête au quotidien, et j'ai compris qu'il fallait vivre en écoutant davantage mon cœur et mes intuitions plutôt que vivre selon les "convenances sociales" ou que ce que les autres voudraient pour moi. Désormais je suis capable de prendre davantage de recul et de relativiser.
J’essaie de prendre le temps de digérer ce que j’ai vu, entendu, appris, compris, reçu lors de mon voyage, de le mêler à toute mon expérience antérieure, pour faire ma propre sauce avec ces nouveaux repères.
Pour moi, réussir sa vie ne signifie pas accumuler une grosse somme d’argent. Mais plutôt faire ce qui me plait avec les gens qui me plaisent. Plus largement, être heureux à travers une vie simple (comme le préconise le Bouddhisme). Dans l’ensemble, j’ai appris à vivre différemment, plus simplement. J’ai compris que ne rien espérer ni projeter, c’est peut-être une des clés du bonheur.
Mon rapport à la société de consommation a évolué

Je ne suis pas du tout certain que cette société qui pousse à la surconsommation et à la satisfaction immédiate et impulsive de nos envies puisse mener au bonheur car il s’agit très souvent, selon moi, d’une compensation d’un vide existentiel et surtout affectif qui est le revers de la médaille de nos pays riches (j'ai compris que dans les pays occidentaux, la richesse matérielle vient combler la pauvreté existentielle et affective). Ceci dit, je peux comprendre qu'il soit nécessaire d’avoir un minimum de variété dans sa garde-robe notamment dans certains milieux professionnels où le code vestimentaire est important.
J'aime bien ces extraits de la chanson d’Alain Souchon « Foule sentimentale » au sujet de l’illusion de bonheur véhiculée par de la société de consommation :
"Oh la la la vie en rose
Le rose qu’on nous propose,
d’avoir des quantités de choses
qui donnent envie d’autres choses...
Allez on nous fait croire,
que le bonheur, c’est d’avoir,
d’en avoir plein nos armoires,
dérision de nous, dérisoire..."
Quelques enseignements sur le voyage et les rencontres

Les lieux les moins touristiques sont souvent des expériences très intenses. Dès qu'on sort des sentiers battus, on se rend compte que les locaux sont plus avenants envers l’étranger, le contact est plus facile. D’autre part, les relations avec les quelques voyageurs rencontrés seront aussi plus authentiques. Je l'ai par exemple vécu lors de ma descente de l'Amazone pendant 3 jours pour aller de Colombie au Brésil : en effet, ce n'est pas le touriste lambda qui accepte ainsi de sortir de sa zone de confort...
Les aspirations contradictoires entre les voyageurs et les locaux. Bien des voyageurs partent sur les routes pour s’échapper d’une certaine société et de ses travers. Or, bien souvent, les locaux qu’on croise dans le voyage ne rêvent que de cette société (les pays riches, la société de consommation). Paradoxal, mais pas tant que ça : en effet, chacun a tendance à penser que l’herbe est plus verte ailleurs, c’est bien connu...
Le manque d’éducation de la grande majorité de la population. En voyageant, on se rend vite compte que la majorité de la population sur cette planète manque cruellement d’éducation. Je l’ai l’observé dans plusieurs domaines : respect de l’environnement, place de la femme, incivilité sur la route, etc. Cependant cette éducation déficiente est souvent compensée par une richesse de relations humaines que nous avons malheureusement perdue dans nos pays riches (au profit du confort matériel).
Je suis revenu avec de nouveaux yeux
Marcel Proust disait que le voyage ne consiste pas à découvrir de nouveaux paysages, mais à revenir avec de nouveaux yeux ! A moins d’être vraiment fermé à la rencontre, notre vision de la vie change forcement.
Voyager apporte une ouverture d’esprit, un nouveau regard sur le monde, sur soi et sur sa manière de vivre. Mon regard porté sur mon pays a changé. J’ai acquis un certain recul sur la société française, ses habitudes, les choses qui semblent figées dans les mentalités parce que cela semble normal à tout le monde, alors que cette normalité est toute autre ailleurs. Difficile désormais de jouer le jeu de la normalité sans broncher et de ne laisser filtrer de mon pays que le positif quand on a matière à le comparer. On redécouvre autrement son propre pays lorsqu’on l'a quitté un certain temps, et cette découverte peut être très décevante, en tous cas elle enlève bien des illusions...
A cela, il faut en plus rajouter aujourd'hui un climat social de fermeture (en France, mais aussi dans beaucoup d’autres pays occidentaux), un état d'esprit étriqué alors que les gens qui voyagent beaucoup et se confrontent à d'autres cultures sont plus ouverts d'esprit...
Je suis revenu en région parisienne mais mon esprit est toujours tiraillé. Le manque des grands espaces subsiste.
Difficile de rentrer d’un long voyage et se replonger dans un monde « normal », celui qu’on a quitté deux ans plus tôt…
Après avoir voyagé en Asie, en Inde et en Amérique latine, je suis convaincu que les gens les plus pauvres sont souvent les plus riches (et les plus heureux, il n’y a qu’à observer leurs sourires), car ils sont riches du coeur, de sentiments, de sourire, d’amis et de famille. Ils savent ce qui est vraiment important. J’ai rencontré des gens d’une gentillesse inimaginable (notamment via mes expériences d’hébergement gratuit chez l’habitant).
Je trouve ça triste quand même que dans notre pays beaucoup de gens se plaignent de leur quotidien mais ne le changeraient pour rien au monde. Pourtant, il y a tant à gagner à remettre en cause des chemins de vie tous tracés, à oser, à prendre des risques, pour transformer ses rêves en projets et finalement… être heureux. A quoi bon exister si c’est pour ne pas se sentir vivant ?...
Le voyage ne doit pas être une fin en soi

Car sinon, le risque est de développer une forme d’addiction au voyage, de vouloir voyager sans cesse juste pour fuir le quotidien et fermer les yeux sur ce qui crée un malaise dans notre vie urbaine occidentale.
Personnellement, je me sens très bien sur les routes mais je ne me vois pas y passer/consacrer ma vie. Le voyage m’a énormément apporté mais je sens que je dois maintenant passer à autre chose.
Fin 2013, j’ai ressenti en moi que je devais partir, et je suis parti. Peut-être qu’un jour je ressentirai à nouveau la même chose et, si c’est toujours possible, je repartirai, mais je ne veux pas que cela soit une fuite de la société et de ses contraintes, je veux que cela le soit pour réaliser un vrai projet.
Et l’avenir alors ?

De nos jours, pas mal de gens remettent en question leur mode de vie, mais rares sont ceux qui franchissent le pas du changement. Je ne comprends pas ce choix de rester là où on ne se sent pas bien, tout en étant parfaitement conscient de son tempérament nomade. Pourquoi refuser de vivre libre ? Pourquoi choisir de souffrir ? Probablement ce sont nos peurs qui nous bloquent à franchir le pas, ou « nos croyances limitantes » comme disent les coachs…
Cependant je suis conscient que l’herbe n’est pas nécessairement plus verte ailleurs, cette société de consommation se trouve partout, même dans les endroits où l’on s’y attend le moins (ex. en Chine et en Inde).
Alors, plutôt que de me lamenter sur le retour et de me bercer dans la nostalgie du voyage, j’essaye de surfer sur cette énergie accumulée et sur mes prises de conscience pour faire aboutir mes projets (projets de vie et projets professionnels). Je suis relativement confiant car je pense que dès lors qu’on a été capable de construire et de mener à bien ce type de périple, on est armé pour réussir d'autres challenges. Mes capacités d'adaptation acquises à l'étranger seront maintenant mon ADN pour le reste de ma vie, et il ne tient qu’à moi de bien les exploiter...
Le retour de ce long voyage se poursuit donc par la construction d'une piste pour le prochain décollage. Non pas pour voyager, mais pour tenter l’expérience d’une nouvelle vie dans un autre pays.
Le mot de la fin

Faire un tour du monde c'est prendre le risque de rompre avec son passé. En sortant des sentiers battus, on s'expose au risque de ne pas retrouver son chemin : mais le nouveau chemin peut être plus beau que l’ancien, alors ça vaut le coup de s’y aventurer...
Pour approfondir, lire aussi mon article Ce que m’a apporté mon tour du monde.
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